Le Sénégal se trouve à l’aube d’une nouvelle ère politique avec l’élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence et la nomination d’Ousman Sonko en tant que Premier ministre. Cette configuration inédite soulève des interrogations sur la possibilité d’un pouvoir bicéphale fonctionnel dans un contexte d’hyperprésidentialisme marqué. Le discours inaugural de Faye, coïncidant avec la célébration de l’indépendance du pays, met en lumière son engagement à réformer en profondeur le système politique et judiciaire sénégalais, en promettant notamment une transition vers des élections gérées par une commission indépendante et une lutte accrue contre la corruption.
La complémentarité entre Faye et Sonko semble, à première vue, idéale pour la mise en œuvre de ces réformes ambitieuses. Sonko, empêché de se présenter à l’élection, a apporté son soutien indéfectible à Faye, promettant une gouvernance conjointe. Toutefois, l’histoire politique du Sénégal montre que la cohabitation au sommet de l’État n’a pas toujours été fructueuse et a parfois conduit à des crises profondes, comme en témoignent les événements de 1962 avec Mamadou Dia.
Le système politique sénégalais actuel, caractérisé par son hyperprésidentialisme, ne semble pas conçu pour un exercice partagé du pouvoir. Cette situation pose la question de l’adaptabilité des institutions et des personnalités politiques à cette nouvelle forme de gouvernance. Faye a évoqué la possibilité de réduire les pouvoirs présidentiels au profit d’un rôle plus substantiel du Premier ministre, une proposition qui, bien qu’ambitieuse, requiert une majorité parlementaire que le duo n’a pas encore sécurisée.
Les analystes politiques s’interrogent sur la viabilité à long terme de cette alliance, soulignant le potentiel de divergences et de rivalités entre les deux hommes. Le risque d’une dualité conflictuelle, inhérent à la structure politique et historique du Sénégal, pourrait compromettre la stabilité et l’efficacité de la gouvernance.
Dans ce contexte incertain, le duo Faye-Sonko se trouve devant le défi de transcender les pratiques politiques traditionnelles pour inaugurer une période de réformes profondes et de développement durable. Leur succès ou échec dans cette entreprise déterminera non seulement l’avenir politique immédiat du Sénégal mais pourrait également offrir un nouveau modèle de leadership et de gestion de la dualité au pouvoir dans la région.