🔍 Composition de la Cour au procès Boko-Homeky : entre interprétation des textes et débat juridique
Le procès très attendu d’Olivier Boko et Oswald Homeky soulève une polémique majeure sur la composition de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET). La défense et le Parquet s’affrontent sur la légalité de la formation de jugement, relançant le débat sur l’application des textes en matière criminelle au Bénin.
La controverse : trois juges au lieu de cinq ?
Dès l’ouverture de l’audience le 21 janvier 2025, les avocats de la défense ont soulevé un point crucial : la composition de la Cour. Selon eux, l’article 254 du code de procédure pénale, tel que modifié en 2018, exige qu’un tribunal statuant en matière criminelle se compose d’un président et de quatre assesseurs, soit cinq magistrats. Or, la CRIET, pour ce procès, a constitué une formation de trois juges, comprenant un président et deux assesseurs.
En réponse, le procureur spécial de la CRIET a publié un communiqué invoquant la loi spéciale n°2020-07 du 17 février 2020. Cette loi, selon lui, réduit la composition des chambres criminelles de la CRIET à trois membres, remplaçant la disposition générale du code de procédure pénale.
Session criminelle ou audience ordinaire ?
Les avocats de la défense dénoncent un amalgame entre une session criminelle et une audience correctionnelle ordinaire. Ils soutiennent que la spécificité des sessions criminelles, même à la CRIET, impose le respect des règles générales fixées par le code de procédure pénale. Le fait que la CRIET ait appliqué la composition à trois juges pour toutes ses audiences criminelles depuis 2020 ne serait pas suffisant pour légitimer ce choix si celui-ci est contraire aux principes fondamentaux du droit. Le débat met en lumière une complexité juridique : la coexistence de deux textes législatifs, l’un général et l’autre spécial, qui semblent s’opposer. Si la loi 2020-07 est postérieure, elle n’abroge pas explicitement les dispositions du code de procédure pénale concernant les sessions criminelles.
Les implications pour le procès
Cette controverse sur la composition de la Cour pourrait avoir des conséquences majeures. Une Cour constituée irrégulièrement risque de compromettre la validité des décisions rendues. Cela pourrait fournir des arguments solides à la défense pour contester un éventuel verdict devant des juridictions internationales. Au-delà des considérations techniques, ce débat alimente un climat de méfiance autour du procès. Pour la défense, la composition de la Cour est un symbole des dysfonctionnements judiciaires et des atteintes aux droits de leurs clients. Pour le Parquet, les objections de la défense viseraient uniquement à retarder les débats sur le fond et à discréditer la justice.